Notre plaidoyer : pourquoi mettre en place une politique publique de l'alimentation ?
Au-delà de ce l’on sait du changement climatique, des dérèglements écologiques mondiaux, de l’effondrement de la biodiversité et des problèmes grandissants de santé publique, plusieurs arguments plaident en faveur de la transformation alimentaire.
Mouans-Sartoux, l'utopie qui se dessine
Il y a une dizaine d’années, alors que le projet alimentaire local était déjà bien avancé, on se mettait à rêver grandeur nature. Les idées fusaient, l’utopie était en marche. On présentait les choses à peu près comme ça : « Les 112 hectares de terres classées agricoles sur la commune sont en production, la ville a aidé à l’installation des agriculteurs et créé des hameaux agricoles pour les loger. Un laboratoire de transformation a été créé et fonctionne à plein régime pour les agriculteurs locaux. Ce n’est pas tout.
Les agriculteurs approvisionnent la cantine en complément de la régie agricole. Les restaurants et hôtels de la ville sont tous bio et locaux, de même pour l’offre alimentaire en entreprise. Les entrepreneurs et les restaurants sont labellisés par la marque Alimentation durable, créée par la ville, selon la hauteur de leur engagement. Tous les habitants de la ville, riches ou moins riches, ont un égal accès à l’alimentation durable. La MEAD a investi les trois étages du mas de des Hautes-Combes, l’équipe renforcée s’y est installée et le lieu accueille citoyens, chercheurs, enfants, autres collectivités, étudiants…
Un marché de producteurs bio et locaux a lieu tous les mercredis soir, permettant aux actifs d’y faire leurs courses après le boulot. Les citoyens participent à nourrir la ville par l’autoconsommation et contribuent à approvisionner en légumes et oeufs bio l’épicerie sociale. Les restaurateurs et commerces de bouche ont également intégré ce circuit en offrant leurs invendus. L’épicerie sociale est devenue un lieu d’accès à l’alimentation durable ouvert à tous et où chacun paye selon ses ressources.
Les citoyens et les acteurs locaux ont rejoint le comité de pilotage de la MEAD aux côtés des représentants de la ville, des associations et des partenaires institutionnels, au sein d’un conseil local de l’alimentation. L’enquête santé a confirmé que « l’assiette mouansoise » contribue au bien-être de l’ensemble de la population.
Bref une ville bio et durable, solidaire et heureuse, qui a défini sa souveraineté alimentaire, qui est autonome en production alimentaire à plus de 15%. Nous n’avons plus besoin d’essaimer notre projet par des formations, accompagnements et visites en France et en Europe car ça y est, tous les territoires poursuivent leur transition pour plus de résilience. Nous continuerons pourtant à échanger longtemps avec eux au milieu des coquelicots ! »
Un jour cette utopie sera réalité, se disait-on. Et d’ailleurs, en se relisant à la lueur du jour présent, on se dit qu’il ne manque finalement plus grand chose.
Et vous, elle se présente comment, votre promesse ?
Des arguments pour agir...
Premier point, les collectivités territoriales sont à nos yeux le bon niveau pour porter la transition alimentaire. Les scientifiques et les institutions de santé sont d’accord là-dessus, le contenu de nos assiettes contribue au bien-être des mangeurs. Une alimentation bio, locale, brute et équilibrée est un vecteur de meilleure santé publique. Or qui peut porter le changement sur les territoires ? La puissance publique locale semble toute désignée pour passer à l’action.
Deuxième argument : rendre crédible la parole de la commune par l’exemple qu’elle donne. Un autre mode de production agricole est possible, qui permettrait de maîtriser le réchauffement climatique en préservant la biodiversité, la qualité de l’eau, de l’air et la vie du sol. Les collectivités disposent de sérieux outils et sont notamment en première ligne pour préserver les espaces fonciers destinés à nourrir les habitants.
Troisième élément : l’accessibilité sociale à l’alimentation durable est un enjeu d’équité, où les collectivités locales ont un rôle évident à jouer pour faire émerger une « démocratie alimentaire ». En prenant conscience des enjeux autour d’une autre alimentation, les territoires se découvrent prêts à définir une forme de souveraineté alimentaire et à la traduire en actes concrets. Sur le plan économique, cela induit immanquablement des échanges plus équitables et solidaires entre les différents acteurs de la fourche à la fourchette : producteurs, transformateurs, distributeurs. Enfin sur le plan démocratique, les citoyens sont invités à s’impliquer directement dans la gouvernance des plans alimentaires durables.
... des résultats tangibles...
L’alimentation est responsable de 25% des gaz à effet de serre (GES), elle représente donc un quart de la solution pour limiter le réchauffement climatique.
Mouans-Sartoux est engagée dans cette transition et mène de nombreuses actions au sein de la MEAD pour transformer les habitudes alimentaires des habitants vers une alimentation meilleure pour le climat, l’environnement et la santé.
D’après une étude menée par des universitaires, en cinq ans, 71 % des habitants ont modifié leurs pratiques alimentaires. Ils ont fait baisser de 30 % leur consommation d’aliments ultra-transformés, réduit de 23 % leur consommation de viande et augmenté de 28% celle d’aliments bio.
Au final, les chercheurs estiment que ces trois changements majeurs ont généré une diminution de 26% de l’impact carbone des habitants de Mouans-Sartoux. De quoi ouvrir l’appétit du chnagement.
... et des questions à régler

Si les collectivités ont bien le droit d’affirmer leur volontarisme en définissant des politiques publiques alimentaires, le cadre législatif et réglementaire actuel les prive toutefois de compétences spécifiques. La MEAD et ses partenaires plaident pour faire émerger le cadre juridique d’une compétence « alimentation et agriculture » au sein des collectivités.
Deux autres demandes sont avancées pour accélérer sur la transition : la création d’un véritable réseau national des PAT (Projets alimentaires territoriaux) avec un financement pérenne de l’État, ainsi que la création d’un nouveau cadre pour la commande publique afin de permettre de relocaliser les achats alimentaires sur les territoires.